Aujourd'hui pratiquée et divulguée partout à travers le monde, la Capoeira tire ses origines d'un passé bien plus lointain. Alors est-ce une danse, un art martial, une lutte, un dialogue corporel ? Voyageons quelques siècles en arrière pour le découvrir...

Ses origines : Le Brésil et l'esclavage

L'origine de la Capoeira est liée à la déportation des esclaves noirs au Brésil qui commence au XIVème siècle.

 

 Depuis l'époque coloniale (1500-1882), le Brésil a connu 3 siècles d'esclavage et à peine 2 siècles de travail "libre". A cette époque, 4 millions d'africains importé sur les terres brésiliennes mais aussi des peuples indigènes ont subi l'oppression des colonisateurs. L'esclave pouvait alors faire l'objet de vente, d'achat, d'échange, de prêt, de don, comme n'importe quelle marchandise. Les derniers esclaves africains sont arrivés en 1850, année de fin du trafic négrier.

L'esclavage au Brésil a été aboli avec la loi Auréa, le 13 mai 1888.


La naissance de la Capoeira


 

 Organiser une résistance

 

Aucun peuple ne vit avec le poids de l'esclavage sans se révolter. Les premières réactions des esclaves ont alors été la fuite et les révoltes individuelles et désorganisées. Avec le temps, la nécessité de s'organiser contre l'oppresseur a mené à des réflexions sur les formes de lutte, en sachant qu'il était nécessaire de trouver des refuges sûrs et loins des fazendas pour apprendre à lutter. 

 

 Le corps comme arme

 

Les esclaves ont compris que pour réussir à s'enfuir ils avaient besoin de se battre. Ils n'avaient alors aucun accès à des armes, seulement leur corps, leur envie de liberté et quelques souvenirs d'Afrique: des danses et des jeux comme la danse du zèbre, le "N'golo", rituel d'initiation des adolescents. Le travail quotidien des esclaves les dotait de force, il suffisait de la combiner avec l'agilité pour en faire une lutte. L'observation de certains animaux rencontrés sur les terres brésiliennes, notamment le lézard, le cobra, la panthère attaquant et se défendant tels des experts, les ont aidé dans la formation de mouvements combinant agilité, technique et force. C'est ainsi que les rasteiras, les pulos, les cabeçadas sont nés et se développeront bien plus ensuite.

 

Le nom : capoeira

 

Il est alors devenu nécessaire de pratiquer, de s'entraîner et d'organiser des mouvements sous forme de lutte. Il fallait tout d'abord s'éloigner de la vue des contremaîtres et des gardes. Une fois de plus, les esclaves ont trouvé cette aide dans la Nature. Ils pénétraient dans les bois proches des "senzalas" (lieu de vie des esclaves) pour se cacher et se préparer à la lutte. Ils choisissaient alors des clairières avec peu d'arbres, à feuillage bas. Cette végétation porte le nom indigène de CAPOEIRA, le terme est ainsi rester pour désigner cette forme de lutter, d'utiliser son corps pour confronter l'opresseur.

 

L'art, la danse et la musique

 

Il n'était pas toujours possible de rejoindre les bois pour apprendre la lutte. Il était commun pendant l'esclavage de rassembler les hommes et les femmes par le chant, la danse et aussi par le culte des Orixas, célebrées également par le chant et la danse. Comme la Capoeira est née d'une combinaison de mouvements dansés, les manifestations festives ou mystiques ont été une opportunité de plus pour la pratiquer. C'est ainsi que la Capoeira a finalement acompagné les chants et les rythmes, qui se sont finalement incorporés à elle, les esclaves connaîssant déjà le berimbau, l'atabaque et l'agogo.

 

Le berimbau et la Capoeira Angola

 

Il est resté le symbole de la Capoeira, l'atabaque et l'agogô intégrant déjà la mythologie africaine, jusqu'à être considéré comme une divinité comme c'est le cas de l'atabaque. Le berimbau a donc été considéré comme le maître de la capoeira, gagnant ainsi la fonction de commander le jeu de la capoeira. Lorsque les contremaîtres et chefs passaient à côté d'un jeu de Capoeira, ils imaginaient difficilement que ces mouvements exécutés avec la légèreté d'un félin et l'esthétique d'un danseur puissent être également des coups déséquilibrants, rapides et combattifs. Ils pensaient donc que la Capoeira était simplement une danse venant d'Angola, cette nation qui a cédé le plus d'esclave pour le trafic négrier. Ainsi est né le nom Capoeira Angola.

 

 

Les fuites et les Quilombos

 

L'esclavage continuait. Le sang des eslcaves coulaient sur les terres du Brésil, alors que cette force de travail animait l'économie de ce qui était alors une colonie portugaise. Mais les esclaves n'acceptaient pas leur condition et les traitements inhumains auxquels ils étaients réduits. Ils luttaient, fuyaient, s'entraînaient pour être plus forts et se joignaient à d'autres secteurs de la communauté, sensibilisant les abolitionnistes. 

Dans leur fuite, ils recherchaient un lieu où il y ait de l'eau et une terre généreuse, difficile d'accès pour les hommes chargés de capturer les fugitifs. Ces lieux ont été nommés "Quilombos", et leurs habitants "os Quilombolas". Le plus important et le plus connu de l'histoire du Brésil a été le Quilombo dos Palmares, situé à l'actuel état d'Alagoas. 

L'interdiction

 

 

Persécuté par le feu et l'épée durant l'esclavage, la Capoeira a continué à être la cible des hommes de pouvoir même après l'abolition. Ce fut alors une loi qui a tenté de mettre fin à la Capoeira. Le Code Pénal de 1890, créé et imposé pendant le gouvernement de Teodóro da Fonseca, interdit sa pratique dans tout le territoire national. En plus de cette persécution officielle, il fallait compter sur la haine de certains chefs de police qui tentaient de mettre fin à la Capoeira, car ils en percevaient la force mais aussi ce qu'elle dégageait : la liberté. Et c'est au nom de cette liberté, et par respect pour les esclaves mais aussi pour la Capoeira dans son ensemble, que la lutte a continué et continue encore jusqu'à ce jour.